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Du dessin à l’aquarelle
Associer aquarelle et numérique revient à manier le feu et la glace.
L’aquarelle est un média instinctif, instantané qui interdit les remords. Il n’est pas ou presque pas possible de corriger une erreur.
Chaque geste est indélébile.
Le numérique est tout le contraire. N’importe quel geste peut être fait, défait, refait. En superposant les calques, on peut ajuster un dessin en précisant les contours (c’est une technique utilisée par les auteurs de Manga). De plus, le numérique permet de recadrer une composition, en zoomant sur une partie, élargissant sur une autre.
En combinant ces techniques, je prépare mon dessin sur ordinateur puis l’exécute sur aquarelle. Les contours des formes une fois en place, l’hachurage permet simplement de vérifier les valeurs du dessin, c’est à dire d’équilibrer le blanc et le noir.
Les techniques d’hachurage
Sur la droite, une représentation de citrons pour marquer les volumes avec une technique simple de traits. Si on regarde bien, les hachures sont représentées dans 2 directions, et cela suffit pour marquer les volumes, amener les contrastes.
Sur la gauche, des objets aux formes diverses avec l’effet de lumière et d’ombre indiqués avec des hachures.
Sur ce dessin, les hachures sont tracées sur 3 directions : il y a deux obliques et une troisième direction horizontale.
Plus on veut foncer, plus on trace de traits. Bien sûr, on peut également les serrer.
Est-ce qu’il y a une règle sur l'orientations des traits ? En fait non, on peut même ombrer un dessin avec des hachurages dans un seul sens.
Sur le croquis ci-contre, sont représentées différentes techniques d’ombrage au crayon.
L’hachurage ou hachurage croisé, celui que j'utilise.
Mais on peut également suivre les contours du dessins, ou représenter des points, superposer des traits, tracer des motifs, griffonner…
Les techniques sont libres, et sur le numérique, on peut changer le hachurage sur un calque, l'ajuster.
A droite, une lecon d'hachurage
Passons au numérique
Techniques automatiques (que je n’utilise pas).
Première méthode, on peut sélectionner une zone sur un dessin et appliquer l’effet Cross hatch. C’est pratique si on veut interpréter une image ou photo existante. Mais nous, nous souhaitons créer la nôtre à partir d’une feuille blanche.
Une variante est d’utiliser un motif (pattern) à appliquer également sur une zone de sélection. L’intérêt de cette méthode est qu’elle apporte des motifs très propres, que l‘on peut changer sur des calques successifs. Il existe une grande variété de motifs, réguliers ou irréguliers.
Traits numériques
Pour l’utilisation de la tablette graphique, il nous faut utiliser un stylo (brush) adapté.
Il faut utiliser une pointe aux bords durs, avec une forme ovale et une dynamique marquée. Cela se règle dans les paramètres «brush settings», comme sur la fenêtre ci-contre. Les traits de stylo sont toujours à bords durs, contrairement aux bords doux des pinceaux et autres outils de marquage pour les arts visuels. Pour donner à votre pinceau un bord dur afin que vous puissiez l'utiliser pour l'ombrage du stylo, faites glisser le curseur "Dureté" du contrôle déroulant des préréglages de pinceau au-dessus du canevas tout à droite.
Donnez à votre pointe de pinceau une taille qui correspond à la taille d'un stylo en faisant glisser le curseur "Taille" vers la gauche ou la droite pour le réduire ou l'agrandir. En général, la taille ne doit pas dépasser quelques pixels de large, sauf si vous souhaitez simuler un stylo avec un trait inhabituellement large, comme ceux des stylos à pointe biseautée ou pinceau.
Je conseille également de pousser vers la droite le paramètre de fermeté dans les réglages Wacom, pour pouvoir effectuer au choix des traits légers, ou plus larges et marqués, selon la pression du stylo.
Travaux en noir et blanc
Le stylet permet de mettre en place le dessin. Je vais montrer cela sur plusieurs compositions.
Je commence avec un extrait de Mecanat, Le cadeau. Pour accompagner le texte de Gabrielle, j’ai représenté une araignée se glissant dans l’étale d’un fleuriste.
Profusion de fleurs et de détails, comment équilibrer toute cela ? Les points d’intérêts sont l’araignée, le cactus, le texte Mecanat.
Avec les étagères et les caisses, j’ai amené une perspective, choisi les fleurs que je souhaitais représenter.
Puis avec un système de hachures j’ai positionné les parties sombres et celles plus claires, les tons intermédiaires.
Mon système d'hachures est assez rudimentaire : diagonales, doublées sur les parties les plus foncées.
On peut étalonner certains gris avec une référence de rayures, que l'on reporte ici et là comme des références de valeur foncée.
Avec ces repères, l’aquarelle est beaucoup plus simple à réaliser, car j’ai positionné les zones claires et celles plus foncées. En plusieurs passages, j’ombre progressivement ce fouillis de détail.
Petit apparté : Pour organiser le fouillis de l'étal du fleuriste, j'ai utilisé quelques astuces :
- Comme le montre le schéma, les points de couleur forment un arc de cercle dont le centre est le cactus ;
- J'ai joué sur les pespectives pour amener le regard sur la fleur-cadeau.
Suite des croquis préparatoires
Deuxième illustration, extraite de Ricochet.
La difficulté sur ce dessin est l’enchevêtrement de légumes, auquel il faut donner un sens.
Le premier plan est un tas d’oignons et des sacs de sel. Pas compliqué en soit. Le personnage se détache bien de l’arrière-plan, l’échoppe beaucoup plus sombre.
Voici l’aquarelle terminée dans les tons verts et rouges. Bien sûr, la couleur vient expliquer davantage.
La tête du personnage est la seule partie du tableau qui soit multicolore.
Hachures et aquarelle
Jusqu’à présent, j’ai expliqué comment utiliser l’hachurage sur tablette graphique pour préparer une aquarelle. Poser les contrastes, régler les tons intermédiaires, marquer les formes. Mais quand arrive l’aquarelle, tous les traits sont remplacés par la peinture. Ils ne servent qu’au repérage.
J’ai commencé cela avec Ricochet. Comme souvent sur une série de tableaux, l’idée vient en marchant et de dessin en dessin, les traits ont gagné de l'importance.
Sur le troisième tableau, l’aveugle aux cigarettes, le dessin au feutre vient converser avec l’aquarelle.
Par conversation je veux dire que par endroit, il n’y a que le trait, et à d’autres que l’aquarelle. A chacun son tour !
Terminons dans les étoiles
Nous arrivons à la fin de l’article sur l’hachurage. J’espère qu’il vous donne envie de crayonner, sur papier ou bien sur tablette.
Je termine avec l’un de mes tous derniers tableaux, le Pêcheur d’étoile. C’est une composition au format BD, et je vais prendre en illustration l’avant dernière image, celle ou le pêcheur touche les étoiles du bout de se ligne.
Ci-contre, la préparation de l’ensemble du dessin, réalisée au stylet numérique. J’ai passé un certain temps sur le dessin du personnage et de la mouette.
Mais on voit bien le travail sur l’hachurage, pour repérer sur le personnage les parties sombres, claires et les zones intermédiaires.
J’utilise principalement la technique de « simple hatching », des traits dans un seul sens plus ou moins denses. Sur les bras, la poitrine, tous les traits sont dans un seul sens. Et pour les parties les plus sombres, je croise avec d’autres traits, et fais apparaitre le personnage.
Sur l’aquarelle, je mets toute l’intensité chromatique sur le ciel, d’un bleu outremer. Le personnage et la mouette sont peints plus légèrement dans des gris oscillants entre le bleu d’Anvers, le rose permanent et le brun Van Dyck.
Je peux me le permettre, car le feutre liner va venir contraster ces tons pastels. En effet, sur le dessin final, je marrie traits et aquarelle, à la fois pour donner de la force graphique, et pour différencier les personnages mortels du ciel éternel.
La combinaison des traits et de l'aquarelle est organisée sur l'ensemble de la page.
- A gauche, traits et aquarelle
- A droite, aquarelle seulement.